Ces trente dernières années, l’oeuvre de René Bolduc s’est construite
dans un constant rapport au temps et au territoire, autant dans son
utilisation de procédés photographiques du passé, que dans les
endroits et les sujets qu’il préconise. Il chasse les coins perdus, les
terres reculées, les gens solitaires et les immortalise avant qu’ils se
transforment ou disparaissent. C’est en portant un regard respectueux
et sobre sur l’apparence du commun et sur le quotidien que Bolduc
donne à son oeuvre toute sa sensibilité.
Sa démarche est marquée par de nombreuses expérimentations
techniques, et motivée par la recherche d’une sensibilité qui dépasse
ce que le sujet à lui seul peut offrir. S’intéressant de près à des
procédés traditionnels et anciens, c’est avec une volonté qui frise
l’obsession qu’il a développé et acquit une maitrise exceptionnelle du
procédé au collodion humide. L’aspect artisanal du procédé offre à la
fois un contrôle important sur la qualité de la photographie tout en
laissant à l’accident un espace précieux pour exister. C’est une prise
de position radicale pour le passé tout en profitant du caractère
instantané offert par un procédé qui exige qu’on traite et qu’on voie
l’image apparaitre là où on l’a prise. S’asseoir devant l’ordinaire, le
regarder en face, en reconnaitre toute la subtilité, s’approcher assez
pour en découvrir toutes les nuances dans l’intimité. Ensuite
photographier. C’est ce à quoi Bolduc s’emploie et il réussit.