Catherine Morin est une artiste peintre qui vit et travaille à Montréal. Formée en photographie, elle s’adonne depuis plusieurs années presque exclusivement à la peinture. Une puissante réceptivité à l’être humain et un intérêt vif pour ce qui froisse les mœurs comme les idéaux – souvent formulés à des fins socio-économiques – caractérise son approche. Catherine Morin aborde avec justesse et sensibilité des problématiques névralgiques en creusant des thèmes ingrats, délicats, souvent escamotés – car malaisants – notamment ici, en Amérique du Nord. Elle donne à voir le vieillissement, par exemple, par la chair qui s’offre et s’affaisse, ou encore par la sexualité ; « le Sud » conceptualisé, moins réel qu’inventé, et les rapports dichotomiques de loisir et d’infériorité entretenus avec celui-ci ; ainsi que le labeur physique, le travail si nécessaire au fonctionnement de nos sociétés et économies, et tout aussi peu valorisé, piètrement rémunéré.
Ces considérations l’emmènent ipso facto à creuser la psyché humaine. Catherine Morin caractérise avec acuité la complexité de l’esprit, notamment par les visages soignés et expressifs qu’elle brosse et qui servent par ailleurs de point de départ à ses toiles.
Si l’on peut repérer des influences de certains monstres sacrés de la peinture à travers l’histoire de l’art – Rembrandt, Courbet, Heward et certes Bacon, ainsi que do Amaral et Saville – il en demeure que Catherine Morin fait montre d’un style ainsi que d’un discours tout à fait uniques et surtout, captivants.
Catherine articule des scènes aussi invitantes que dissonantes. L’importante présence de la végétation, souvent exubérante, nous transpose avec adresse dans de différents contextes suggérés mais jamais définis, du vaste pré ensoleillé au salon poussiéreux, en passant par une plage de piscine, un patio tropical et un camping municipal. Elle évoque allègrement les éditos de mode et mondanités avec sa maîtrise de la mise en scène et de l’intrigue : grâce à son oeil de photographe, elle compose ses tableaux de grands formats en recourant à des dispositifs caractéristiquement expressifs tels que les raccourcis, contre-plongées, et autres angles rapprochés. Catherine Morin pose ainsi les jalons d’une histoire que l’on se plaît, à notre tour, à inventer.
Son art n’est pas rhétorique : à son plus acéré, Morin est humoristique ; et à son plus bienveillant, elle témoigne d’une exquise tendresse.