La Loi sur le statut de l’artiste : un état des lieux par le directeur général

Il existe au Québec deux lois sur le statut de l’artiste : la première s’intéresse aux artistes de la scène, du disque et du cinéma. Pensons par exemple aux réalisateurs et aux artistes se produisant devant public (la Loi S-32.1).

La seconde loi, celle qui nous intéresse tout particulièrement, couvre les artistes des arts visuels, des métiers d’art et de la littérature. Or, il existe essentiellement une différence fondamentale entre ces deux lois qui engendre des conséquences importantes pour les artistes en arts visuels (la Loi S-32.01)

En effet, la Loi 32.1 comprend toute une section prévoyant les mécanismes de négociations d’une entente collective à l’instar de ce qui existe pour les syndicats professionnels. C’est ainsi, à titre d’exemple, que l’Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec (ARRQ) a pu négocier de véritables ententes collectives avec des associations de producteurs des ententes collectives fixant les conditions minimales de travail incluant également la contribution à des avantages sociaux pour les réalisateurs.

Vous l’aurez compris, pour le moment ce régime n’est pas possible pour les artistes en arts visuels, qui doivent se contenter d’une loi que je qualifierais de bancale, en ce qu’il lui manque cet élément majeur qui nous permettrait de négocier de véritables ententes collectives avec les diffuseurs qui contractent avec les artistes.

Le RAAV est accrédité également en vertu de la Loi fédérale sur le statut de l’artiste qui permet quant à elle de négocier une entente cadre, mais uniquement entre les artistes en arts visuels et les organismes et agences du gouvernement fédéral canadien. C’est-ce qui a amené le RAAV et le Front des artistes canadiens (CARFAC) à négocier une telle entente avec le Musée des beaux-arts du Canada en 2014.

Ceci dit, au niveau du cadre législatif provincial, le RAAV a fait de son mieux au cours des années pour tirer le maximum de la loi actuelle, qui se limite à prévoir l’obligation de conclure un contrat écrit entre les artistes et les diffuseurs et une liste de six éléments essentiels devant s’y retrouver. Par ailleurs, notre Loi S-32.01 comprend une section 2 bien « sybilline », en prévoyant simplement que les artistes et diffuseurs peuvent conclure une entente générale concernant les contrats de diffusion. Telle que rédigée, vous comprendrez que cette disposition ne nous permet pas d’engager de véritables négociations avec les diffuseurs comme nous l’avons fait, au fédéral, avec le Musée des beaux-arts du Canada.

C’est dans ce contexte qu’au cours des dernières années, le RAAV a poussé au maximum avec les moyens du bord en développant des grilles tarifaires suggérées, des guides de meilleures pratiques, des contrats-types ou même des ententes à portée plus limitée aux usages dits numériques.

Une révision de « notre loi » sur le statut de l’artiste s’impose donc plus que jamais. Sans tomber dans la pensée magique, nous voyons quelques lueurs d’espoir dans les intentions déclarées à ce sujet dans la politique culturelle du Québec telle qu’endossée par le nouveau gouvernement. Dans un prochain message, je détaillerai certaines avenues plus juridiques que nous pourrions invoquer pour contester cette loi.

– Bernard Guérin, directeur général du Regroupement des artistes en arts visuels du Québec