Ironiquement, ma plus grande motivation pour devenir artiste était toute l’intimidation que j’ai vécue à mon enfance. La honte s’est emmagasinée en une énorme boule d’énergie qui est devenue un carburant pour ma création.
Avec le harcèlement mais aussi avec l’admiration de mon talent, je me rendais compte que je n’avais plus rien à perdre à travers le dessin. Le chemin vers l’expression était libre de complexes. Il y avait un caractère amusant et vengeur dans l’art. Comme j’y trouvais un refuge, le désir d’être original était rendu manifeste.
J’ai toujours aimé dessiner dès mon plus jeune âge. Mais une véritable inspiration est venue à l’adolescence dans un séjour passé dans mon pays d’origine, en Argentine. La fréquentation d’un collège pendant une année offrait un contexte stimulant. L’un des cours éveilla ma curiosité pour la littérature. La découverte de ce trésor caché venait s’ajouter à mon émerveillement face à la vaste culture de mon oncle. J’ai aussi rencontré un camarade de classe au talent artistique extraordinaire.
C’est ainsi que mon année exotique est devenue un moment fantastique. Mon collègue était issu d’une famille d’artistes. J’étais fasciné par le monde enchanté de son imaginaire, qui arborait les murs de l’école. Ses murales reprennaient les personnages de ses bandes dessinées populaires.
Il y avait un contraste entre l’effet enchanteur de mon séjour en Argentine et mon humeur générale. Bien que j’étais timide et triste par moments, c’était aussi une époque inoubliable : dans la ville de Buenos Aires, j’assistais périodiquement à des incroyables rassemblements festifs extérieurs. Cette sensation de rêve se superposa à mon admiration du prodige de mon camarade d’école. J’ai été saisi du désir de recréer la même expérience à travers mon art.
Or, j’ai vécu par la suite une période d’incertitudes avec le refus d’accès à des programmes de dessin animé. Ces déceptions ajoutées à d’autres moments stressants m’ont terrassé. Et pendant un certain temps, je remettais en doute mon talent d’artiste.
Heureusement, un tournant dans ma vie s’est produit à l’université avec la rencontre d’une étudiante chinoise. Il s’averait qu’elle vivait dans mon quartier. Elle partageait un appartement avec sa mère qui avait aussi la réputation d’être une artiste professionnelle. Ces voisines jouèrent un rôle déterminant pour ma carrière d’artiste et pour le développement de mon talent. Elles avaient une solide formation académique, qu’elles révélaient à travers leurs manuels scolaires et leurs sculptures de plâtre. Leur devise était le développement du sens de l’observation.
J’apprenais que si mon intention était de m’inspirer des anciens maîtres, je devais m’impliquer dans une pratique disciplinée. Ainsi, la mère m’invitait dans ses sorties pour pratiquer plusieurs séances d’aquarelle en plein air. Je bénéficiais de ses commentaires sur mes peintures de paysages, de natures mortes, ainsi que sur mes dessins de portraits et de modèles vivants.
Je complétais par la suite ma formation professionnelle en suivant le programme des Beaux-arts de l’Université Concordia. À la même époque, je me servi d’une experience de caricaturiste de rue pour défier ma timidité. Le métier était fabuleux. L’interaction directe avec les gens m’épanouissait dans mon estime et dans ma confiance personnelle.
J’ai aussi beaucoup surmonté ma gêne et mes frustrations à travers l’expression littéraire, en lisant des livres, en tenant un journal, en écrivant des projets artistiques, en préparant des expositions et des matières de cours. Il n’y a pas de mot pour décrire combien de liberté cela m’a donné !